Un bidon contenant un herbicide à base de glyphosate. Photo: GM watch
La contamination de l'environnement par les herbicides contenant du glyphosate est maintenant omniprésente. Deux nouvelles études s’intéressent à l’impact du glyphosate sur les grossesses et le développement de la flore intestinale.
Une première étude a été menée en Argentine, au cœur de la région des grandes cultures. Cette étude montre que les habitants de la ville de Monte Maìz sont soumis à une importante exposition environnementale au glyphosate (79 kg/personne/an) et que le taux d'avortement spontané y est aussi trois fois plus élevé que la moyenne nationale.
Une deuxième étude, menée en Italie, démontre un impact significatif du glyphosate et de formulations d’herbicide contenant du glyphosate sur la flore intestinale des rats jeunes. Cette étude donne à réfléchir lorsqu'on sait que des changements radicaux du microbiote, à un stade de vie précoce, sont corrélés à l'apparition de certaines maladies à l'âge adulte.
Des résidus de glyphosate ont été trouvés dans l'air, les eaux souterraines, l'eau potable, les cultures, les aliments, les aliments pour animaux et les hommes. Les effets possibles sur la santé humaine du glyphosate et des produits qui en contiennent font donc l'objet d'un débat public intense, tant sur ces effets cancérogènes, de sa toxicité à long terme que de son accumulation dans l’environnement. Les deux études, décrites ci-dessous, s'intéressent aux effets de l'exposition chronique au glyphosate.
L'étude argentine a été divisée en deux parties : une étude épidémiologique consistant en une enquête auprès des ménages sur l'incidence des fausses couches et des malformations congénitales ; et une analyse environnementale, enregistrant les différentes sources de pollution locale et mesurant les niveaux de pesticides couramment utilisés dans le sol, l'eau et les stocks de balles de céréales.
Dans l'analyse environnementale, la pollution par le glyphosate et, dans une moindre mesure, par d'autres pesticides, s'est avérée être le contaminant environnemental prédominant à Monte Maíz. La concentration de glyphosate (3868 ppb) était dix fois plus élevée que celle des autres pesticides étudiés, comme l'endosulfan II (337,7 ppb) ou le chlorpyrifos (242 ppb). Dans l'ensemble de la région, 650 tonnes de glyphosate et 975 tonnes de pesticides totaux sont pulvérisés chaque année. Aucune autre source pertinente de pollution n’a été détectée.
Dans l’étude épidémiologique, les taux d'avortement spontané et d'anomalies congénitales mesurés sont, respectivement, trois fois et deux fois plus élevés à Monte Maíz que la moyenne nationale rapportée par le service de santé nationale (10% vs 3% et 3% - 4,3% vs 1,4% respectivement). Ni l'âge de la mère, ni le tabagisme, ni la pauvreté n'expliquent le taux élevé de fausses couches. Néanmoins, les auteurs mettent en garde contre le fait que leur recherche, comme toutes les études épidémiologiques, montre une corrélation entre l'exposition au glyphosate et les effets nocifs sur la reproduction, mais ne prouve pas l'existence d'un lien de causalité. Les liens de causalité ne peuvent être démontrés que par des études animales contrôlées.
L'étude toxicologique sur les rats a été menée à l'Institut Ramazzini, Bologne, Italie. L'Institut est reconnu pour avoir fourni des résultats qui ont servi de base scientifique solide pour réglementer et limiter l'exposition à un certain nombre de substances dont, par exemple, le chlorure de vinyle, le benzène ou le formaldéhyde.
Dans cette étude, du glyphosate, ou son équivalent commercial Roundup, ont été mélangés à l’eau de boisson de rats de laboratoire et leurs petits, à des doses permises chez l’homme. Ces doses sont considérées comme sûres par l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV), y compris pour les enfants et les femmes enceintes. La flore intestinale des rats jeunes exposés à ces doses « normales » d’herbicide a entraîné des changements importants de la flore intestinale. Les effets sur la flore intestinale n'étaient pas significatifs chez les mères adultes.
Les chercheurs soulignent dans leur article que, vu que la flore intestinale des rats est plus semblable à celle des humains que celle des souris, les rats sont un excellent modèle animal pour explorer les effets des herbicides. Un des auteurs de l’étude, le professeur Jia Chen, de l’Icahn School of Medicine at Mount Sinai à New York City, conclu que « Notre étude fournit des preuves initiales que les expositions aux herbicides contenant du glyphosate, à des doses considérées comme sûres, sont capables de modifier le microbiote intestinal au début du développement, en particulier avant le début de la puberté. (…) la compréhension des changements microbiotiques au cours de cette période critique de susceptibilité pourrait être d'une grande importance pour la prévention des maladies. »
Plusieurs instituts et universités en Europe et aux États-Unis ont participé à cette étude. Celle-ci a coûté 300 000 euros et a été financée par 30 000 membres de la société civile italienne, associés à la coopérative de l'Institut Ramazzini. Une campagne de financement participatif a été lancée pour soutenir une étude à long terme sur le glyphosate qui, à la suite de ces résultats, est maintenant requise de toute urgence. Ces études ont été portées à notre attention par GM watch.
- Lien externe : Campagne de financement participatif pour étudier les effets à long terme du glyphosate
- Lien externe : L’étude toxicologique italienne
- Lien externe : L’étude épidémiologique argentine